À LR, Laurent Wauquiez ne rentre pas dans le rang
L’après-Bayrou est encore l’occasion pour le patron des députés LR d’exprimer des différences avec Bruno Retailleau. Le bureau stratégique ce mardi en a été l’occasion.

« C’était très électrique entre Bruno Retailleau et Laurent Wauquiez », n’en revient pas un membre du comité stratégique de LR. La réunion de cette importante instance mardi matin, au lendemain de la chute du gouvernement Bayrou, a été l’occasion à nouveau d’échanges tendus entre le président du parti et le patron des députés LR à l’Assemblée nationale. Alors même que l’objectif de la réunion, lors de laquelle le principe d’une feuille de route programmatique à soumettre au futur Premier ministre devait être acté (avant la nomination de Sébastien Lecornu mardi soir), était de « parler d’une seule voix », selon l’expression du secrétaire général du parti, Othman Nasrou. La veille, Les Républicains se sont illustrés en étant le groupe le plus divisé de l’hémicycle sur le vote de confiance accordé à François Bayrou avec 13 députés qui se sont exprimés contre et 9 qui se sont abstenus sur 49. Soit presque la moitié.
Depuis plusieurs jours déjà, les entourages de Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau commentaient ce schisme annoncé en y voyant un revers… pour l’autre, les deux s’accusant au choix de manquer d’autorité ou d’écoute. « La séquence est mauvaise pour les deux », tranche un cadre LR. Il faut dire qu’en disant lundi à François Bayrou dans son intervention dans l’hémicycle que « le cœur des convictions de notre groupe, c’est-à-dire la défense de la France qui travaille, n’a pas été écoutée », Laurent Wauquiez n’a pas exactement encouragé ses troupes à soutenir avec rage le Premier ministre… Le sujet est donc revenu autour de la table ce mardi. « Attention à ce que le groupe ne soit pas une enclave au sein du parti », a mis en garde Bruno Retailleau.
Un agacement palpable avec Retailleau
Le patron des députés LR a alors reproché au président du parti avoir indiqué dans un communiqué au nom du parti vouloir voter la confiance à Bayrou sans avoir consulté les députés. Ce à quoi Bruno Retailleau a rappelé que c’est Laurent Wauquiez qui avait fait savoir qu’il souhaitait consulter les députés dans un premier temps sans lui. « Quand j’étais président du parti, tu m’as rarement invité au groupe au Sénat (alors présidé par Bruno Retailleau) ! » a répliqué, agacé, Laurent Wauquiez.
Le député de Haute-Loire assure avoir des différences « dans le détail » avec son ancien rival sur l’après-Bayrou. Ainsi si Bruno Retailleau veut dresser une sorte de feuille de route, en clair ses priorités programmatiques à soumettre au prochain Premier ministre, Laurent Wauquiez, lui, préférerait négocier un « programme de travail » de ce que le futur chef de gouvernement acceptera réellement de mettre en œuvre.
« La feuille de route, on l’a déjà expérimenté avec Barnier et Bayrou et ça n’a pas fonctionné. Certains étaient alors trop pressés de rentrer au gouvernement, détaille un wauquiéziste. Ce qui compte, ce n’est pas ce qu’on demande, c’est la synthèse à laquelle parviendra le futur Premier ministre dans son accord de non-censure avec le PS ou le RN… »
« En apparence, ça part dans tous les sens »
Une façon de mettre plus haut la barre d’une future participation de LR au prochain gouvernement et rendre cette possibilité plus hypothétique. « C’est pour emmerder Retailleau et lui barrer la route de l’Élysée, pas besoin de chercher plus loin avec Wauquiez ! » s’exclame un membre du comité stratégique. Ce que dément l’entourage de l’Auvergnat : « Ce n’est pas mettre la barre plus haut, c’est être plus transparent. On veut juste savoir dans quoi on va être embarqués… »
La même suspicion de vouloir barrer la route à Retailleau pèse sur Laurent Wauquiez quand celui-ci assume de dire qu’il n’est pas pour une censure automatique d’un Premier ministre socialiste. Ce à quoi Bruno Retailleau a affiché une fin de non-recevoir nette lors de la rentrée de LR le week-end dernier au Port-Marly (Yvelines). Pour le camp Retailleau, nul doute : l’objectif serait de pousser Emmanuel Macron à nommer un gouvernement le plus à gauche possible pour forcer LR à revenir dans l’opposition. Et empêcher Bruno Retailleau de bénéficier plus longuement des lumières médiatiques procurées par la place Beauvau. Laurent Wauquiez est revenu de lui-même sur ce sujet ce mardi, crispant les retaillistes. « Au fond, Bruno Retailleau pense la même chose : si Éric Lombard était nommé Premier ministre, il ne le censurerait. Pourquoi ne le dit-il pas ? », s’agace un pro-Wauquiez. « Retailleau a fait King-Kong devant les militants LR à Port-Marly mais King-Kong, c’est fini ! », se marre un cadre LR.
« En apparence, ça part dans tous les sens mais ce n’est pas Wauquiez qui veut une dissolution ou une démission du président de la République », semble vouloir apaiser l’entourage de Laurent Wauquiez alors que des voix chez LR dans ce sens se font désormais entendre. Une façon de souligner l’air de rien que le parti, présidé par Bruno Retailleau, ne serait pas tenu…






