« C’était un foutu bordel dans sa tête » : à La Chapelle-Gauthier, un homme condamné pour tentative d’assassinat
Le drame remonte au 2 octobre 2022. L’accusé, séparé de la mère de ses filles depuis deux ans, ne supportait pas la situation. A sa sortie de prison, il aura interdiction de paraître en Seine-et-Marne.

La cour d’assises de Seine-et-Marne, à Melun, a tranché – mardi - en déclarant Engin O. coupable de tentative d’assassinat. Son verdict : 20 ans de réclusion criminelle. Les jurés ont donc considéré que cet homme de 46 ans avait bel et bien tenté de tuer le nouveau compagnon de la mère de ses trois filles, dont il était séparé. La cour a également prononcé un suivi socio-judiciaire d’une durée de trois ans, lui interdisant – entre autres – de paraître en Seine-et-Marne.
Cette séparation, qu’il n’acceptait pas, l’a conduit à poignarder dans le thorax cet homme qu’il n’avait jamais vu, le 2 octobre 2022, à La Chapelle-Gauthier. Quelques minutes plus tôt, Engin O. avait défoncé le portail de la propriété de la victime avec sa Mercedes, avant de percuter une Audi stationnée à l’extérieur.
Le couple, qui dînait en famille, avait entendu un bruit de fracas. Engin O., le couteau à la main, avait grimpé les marches de la maison, avant de se retrouver face à celui qu’il considérait comme son rival. Une bagarre avait opposé les deux hommes, l’accusé poignardant sa victime, touchée au diaphragme par une lame de 20 cm. L’ex-compagne d’Engin O. était parvenue à le désarmer et des voisins – alertés par les cris – étaient intervenus pour le maintenir au sol, en attendant l’arrivée des gendarmes. Surexcité, l’accusé continuait à proférer des menaces de mort.
« Lequel des deux pouvait avoir le plus peur ? »»
« S’il visait vraiment la jambe, pourquoi est-ce qu’il a atteint le thorax ? Essayez de visualiser la scène. La localisation démontre l’intention homicide. Quand on crie je vais tous vous tuer, ça veut dire quoi ? Quand on se dirige d’un pas précipité avec un couteau, quelle est l’intention ? », a martelé l’avocat général Yacine Benmohammed. Qui a requis 25 ans de réclusion criminelle, assortis d’une période de sûreté des deux tiers, ainsi qu’un suivi sociojudiciaire d’une durée de dix ans.
« Il dit qu’il vient se suicider et se couper les veines. Mais que fait-il pour se suicider ? Rien. Personne ne l’a entendu parler de suicide. En garde à vue, pas une seule fois il n’en parle ». Et le magistrat de s’étonner : « L’accusé aurait eu peur de la victime ! Pourquoi défonce-t-il son portail et va-t-il au contact ? Lequel des deux pouvait avoir le plus peur ? La victime doit sa survie à sa compagne, qui a été héroïque, et au courage civique des voisins ».
« Il la considérait comme sa propriété »
Pour l’avocat général, l’intention homicide était une évidence. Tout comme la préméditation : « Pour les proches des parties civiles, la question n’était pas de savoir si l’accusé allait tuer. La question était de savoir quand ça allait se passer. Les proches de son ex-compagne vivaient avec la peur permanente que ça se produise ».
Et Yacine Benmohammed de revenir sur le harcèlement, les menaces de mort et les violences subies par la mère de famille depuis la séparation, survenue deux ans plus tôt. La poussant à déposer pas moins de sept plaintes. « Ce coup de couteau, c’est l’apothéose d’une suite de comportements hostiles. Il voulait lui nuire, il la considérait comme sa propriété, sa chose ». Engin O. avait d’ailleurs été condamné pour ces faits à une peine de huit mois de prison avec sursis probatoire, quelques semaines avant la terrible soirée.
« Leur faire mal en se suicidant devant eux »
L’avocate de la défense n’avait pas la même lecture du drame. Estimant qu’il n’y avait « pas qu’une seule vérité », Me Clarisse Scialom a enjoint les jurés à essayer de comprendre l’état d’esprit d’Engin O. à cette époque. Il avait perdu sa compagne, son entreprise avait périclité et ses filles étaient placées dans un foyer. « On parle d’une dépression latente depuis des années ».
Témoin de violences conjugales dans son enfance, l’accusé a « reproduit ce que son père avait fait ». Et l’avocate d’insister sur « la souffrance et le mal-être » de son client, dépressif et suicidaire. Pour elle, le déroulement de la soirée du 2 octobre 2022 est « moins rationnel » qu’il n’y paraît : « C’était un foutu bordel dans sa tête. Il a pu avoir la volonté d’en découdre, pas de tuer quelqu’un qu’il n’avait jamais vu. Il voulait leur faire mal en se suicidant devant eux. Il voulait que tout le monde culpabilise ».








