Hauts-de-Seine : la maison des handicapés plombée par la cyberattaque du conseil départemental
Selon les familles de personnes handicapées, certains dossiers de la MDPH ont littéralement disparu des serveurs après la cyberattaque survenue le 19 mai. Et les délais de traitement, déjà bien plus longs que ce que prévoit la loi, continuent de s’étirer.

Elle a eu lieu il y a plus de trois mois. Pourtant, les conséquences de la cyberattaque « de grande ampleur » survenue le 19 mai sur le système informatique du conseil départemental des Hauts-de-Seine plombent, aujourd’hui encore, le fonctionnement de certains de ses services. Notamment celui de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH), où le traitement des dossiers, déjà très compliqué, a subi un sérieux coup de frein.
Conséquences directes de cette attaque : des milliers de dossiers ont été figés, sans accès en ligne pour les familles concernées. Pire, parmi ces dossiers, certains ont littéralement disparu des serveurs. Comme le dossier de renouvellement constitué par Maud au bénéfice de sa fille de 7 ans, atteinte d’une maladie génétique rare.
« J’ai dû repartir de zéro »
Un dossier indispensable pour que la fillette bénéficie des soins de l’orthophoniste, de l’ergothérapeute et de la psychomotricienne, nécessaires à sa bonne évolution. Mais aussi pour financer en partie l’école privée pour enfant neuroatypique qu’elle doit intégrer cette année.
« J’ai dû repartir de zéro, tout réimprimer et tout renvoyer en version papier, se désespère Maud, qui a stoppé son activité professionnelle en janvier pour accompagner sa fille au quotidien. Les délais sont déjà très longs à la MDPH 92 mais, là, l’année va se terminer et on n’aura toujours rien obtenu. »
Un constat amer partagé par Marion. En juin, cette mère de famille d’Issy-les-Moulineaux a, elle aussi, appris qu’elle devait reconstituer le dossier de 200 pages déposé plus d’un an plus tôt, en mai 2024, afin d’obtenir une accompagnement d’élèves en situation de handicap (AESH) pour son fils de 10 ans atteint de troubles de l’attention et d’une maladie du tissu conjonctif.
Un dossier complet, étudié et validé en commission en avril, mais dont la MDPH n’aurait plus aucune trace sur ses serveurs. Et ce, depuis la cyberattaque. « C’est le scénario d’un mauvais film de série B, soupire-t-elle. Ce dossier, j’ai mis un an et demi à le monter et on m’explique que je dois tout recommencer. Résultat : on se retrouve en rupture de soins pour mon fils parce qu’on n’a plus d’argent. »
« C’est devenu un goulot d’étranglement »
Au sein de la MDPH, on confirme que la cyberattaque de mai est encore loin d’être classée au rang des mauvais souvenirs. « Depuis qu’elle a eu lieu, on ne traite que les premières demandes et encore, confie une source interne. En ce qui concerne les renouvellements ou les recours administratifs préalables obligatoires, on ne peut absolument rien faire, on ne dispose même plus du logiciel. Et aucune date n’est encore fixée pour un retour à la normale. Nous avions déjà jusqu’à deux ans de retard pour le traitement de certains dossiers. Là, ça va être bien pire. »
Autrement dit, les délais de traitement des dossiers, qui oscillaient déjà entre six et dix-huit mois — bien au-delà des quatre mois en théorie imposés par la loi — vont encore s’étirer. « La MDPH n’est plus un guichet unique, c’est devenu un goulot d’étranglement, se désole Maud. Et pourtant, nous ne demandons rien d’autre que ce que la loi garantit. »

De son côté, le département explique avoir activé un plan de continuité d’activité (PCA) afin de maintenir l’activité des services publics. Un plan qui comprend la mise en place d’un mode de traitement « papier », pour les demandes et les situations urgentes, et le renforcement de l’accueil physique et téléphonique, pour informer au mieux les usagers et les accompagner dans leurs démarches malgré les contraintes.
21 000 dossiers récupérés auprès du prestataire en charge de la numérisation
« Dans le cadre du PCA, un outil temporaire de suivi des traitements a été mis en place afin de garantir la traçabilité des évaluations et des décisions prises pendant cette période et éviter toute perte de temps plus tard au moment de la reprise, précise-t-on au conseil départemental des Hauts-de-Seine. La MDPH, et plus généralement les services sociaux du département, ont fait l’objet d’une priorisation absolue pour la remise en route des applications métiers. »
Le département explique également que depuis la cyberattaque, la MDPH a accueilli physiquement 6 800 personnes et réceptionné une moyenne de 2 500 nouveaux dossiers par mois. « Par ailleurs, elle a pu récupérer auprès du prestataire, qui numérise les dossiers papier envoyés par les usagers, plus de 21 000 dossiers déposés depuis septembre 2024 jusqu’à la date de la cyberattaque. »
En parallèle, la MDPH est intervenue auprès de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie pour récupérer les 1 400 dossiers déposés sur le téléservice MDPHenligne, avant la cyberattaque et pas encore récupérés par un flux informatique dans le système d’information de la MDPH.








