« J’ai versé 10 000 euros » : ces internautes pris au piège de Flairwork qui promet de l’argent facile en quelques clics
Rédiger des commentaires en ligne en échange de centaines d’euros en cryptomonnaie, c’est le crédo du site Flairwork. Mais des dizaines d’utilisateurs affirment avoir versé de l’argent, parfois des milliers d’euros, sans aucun retour.

La promesse était belle, les pertes s’annoncent folles pour ceux qui y ont cru. Via la plate-forme Flairwork, ils se sont vus proposer plusieurs centaines d’euros, voire des milliers, en échange de quelques minutes de travail depuis leur téléphone. Il suffisait de rédiger des commentaires sur un site dédié, des sortes de faux avis. Problème pour débloquer les fonds ― en Tether (abrégé USDT), une cryptomonnaie ― il leur faut d’abord verser de l’argent.
« C’était une aubaine », soupire Jean, 52 ans. Électricien dans l’Ariège, il n’a pas de chantier tous les jours. « Je m’intéressais déjà à la cryptomonnaie. Je tombe sur Flairwork qui propose des petites tâches à accomplir en échange de crypto, je me dis que c’est parfait pour moi » raconte-t-il.
En juin, il paye 40 euros son inscription sur le site. Au départ il doit rédiger trois avis quotidiens sur la plate-forme. Les commissions sont limitées. Il débourse alors 80 euros supplémentaires pour changer de niveau. « Flairwork nous faisait miroiter une grille de salaire mirobolante. À partir du niveau 4, le site vous promet plus d’un Smic par mois. C’était fabuleux », détaille-t-il.
La grille ― que nous avons pu consulter ― promet une commission de 500 dollars par jour au niveau 6. Jusqu’à 3 100 dollars par jour au niveau 8, le dernier niveau.
Une pyramide de Ponzi ?
Mais pour monter dans les échelons, il faut attirer de nouveaux membres. « Ma référente me poussait, via la messagerie Telegram, à faire de nouvelles recrues. J’ai trouvé ça bizarre », raconte Jean. Dans son esprit, une idée surgit. Et s’il était victime d’une pyramide de Ponzi ? Un montage financier frauduleux qui consiste à rémunérer les investissements des clients essentiellement par les fonds procurés par les nouveaux entrants dans la combine.
Sans recrutement et une fois ses propres virements arrêtés, son compte est bloqué sans explication. « Ce qui me plaisait c’était d’avoir un salaire en ne faisant pas grand-chose. C’est sûr que la promesse était trop belle. Je me sens un peu stupide d’y avoir cru », reconnaît-il, conscient qu’il ne reverra pas l’argent qu’il a donné, environ 800 euros.
Début août, il se met en quête d’autres victimes. Ils sont une trentaine à s’être regroupés sur un groupe Telegram. « J’ai été naïve, j’y ai cru et je suis resté plusieurs mois. Mais aujourd’hui, je veux prévenir les autres. Nous sommes sûrement des milliers, complètement démunis », détaille l’une d’elles. Ils ont lancé une pétition sur le site Change.org : les arnaqués de Flairwork.
Un compte bancaire à Malte
« Ce qui me rend dingue c’est tous ces abrutis qui continuent à recruter du monde et à faire la promotion du site, pensant qu’ils vont toucher le jackpot comme ça », s’agace Jean. Sur Facebook, les avis négatifs ne manquent pas, ils sont pourtant moins nombreux que ceux offrant des codes de parrainage pour s’inscrire sur la plate-forme.
Dans le Haut-Rhin, Julien dresse le même constat. Producteur de musique de 60 ans, il cherchait un complément de revenu. « J’ai commencé mi-juin. Très rapidement, on vous promet des voitures, des lingots… La confiance s’installe parce qu’au début j’ai pu retirer de l’argent. On vous dit que si vous versez 1 000 euros vous aurez un cadeau de 5 000 euros. J’ai dû toucher près de 3 000 euros tout de même. Mais en échange j’ai versé 10 000 euros en une dizaine de virements », soupire-t-il.
Julien a effectué ses virements vers un compte bancaire à Malte via le site de cryptomonnaie Deblock. « Évidemment maintenant ça me paraît louche mais le site est extrêmement bien fait. Flairwork affirme travailler avec Amazon, Temu, Walmart, Alibaba… L’entreprise est soi-disant basée à Denver aux États-Unis », retrace-t-il.
Aujourd’hui sa cagnotte virtuelle affiche près de 32 000 dollars. « Mais je ne peux plus y toucher. Tout est bloqué, il faut que je verse encore de l’argent pour en récupérer une partie. C’est sans fin », confie-t-il. Il a tenté de déposer plainte en France, sans grand espoir.
« J’avais soi-disant gagné un iPhone d’une valeur de près de 1 000 euros, mais pour le recevoir, il fallait encore payer une somme absurde. Au final, la seule chose que j’ai reçue, c’est une tasse Flairwork… Histoire de faire croire que c’est sérieux », ajoute une autre victime.
Interpellée sur ce dossier, la Répression des fraudes nous a fait savoir qu’il s’agissait d’une escroquerie et que cela ne relève pas de ses compétences. Sur son site le ministère de l’Économie prévient : « Méfiez-vous des promesses d’enrichissement facile ! ». Et conseille de faire attention à l’emploi de formules accrocheuses du type : « devenir riche en travaillant depuis son domicile », « opportunité financière », « investir pour gagner », « indépendance financière », liées à un discours d’appartenance à un cercle fermé d’initiés… Comme c’est le cas de Flairwork. Contactée, la plate-forme n’a pas donné suite à notre sollicitation.






