Nouveau Premier ministre : le RN met déjà la pression sur Lecornu

À peine le Premier ministre nommé, le parti de Jordan Bardella et de Marine Le Pen s’est montré menaçant… sans être définitif sur son sort.

Jordan Bardella et Marine Le Pen le 2 septembre lors d'un rendez-vous avec le désormais ex-Premier ministre, François Bayrou. REUTERS/Benoit Tessier
Jordan Bardella et Marine Le Pen le 2 septembre lors d'un rendez-vous avec le désormais ex-Premier ministre, François Bayrou. REUTERS/Benoit Tessier

La peinture était encore fraîche. À peine la nomination de Sébastien Lecornu à Matignon officialisée, ce mardi peu avant 20 heures, le RN avait déjà dégainé. Première à faire feu, Marine Le Pen : « Le Président tire la dernière cartouche du macronisme, bunkérisé avec son petit carré de fidèles. Après les inéluctables futures élections législatives, le Premier ministre s’appellera Jordan Bardella », écrit la cheffe des députés RN sur X.

Ordre protocolaire oblige, Bardella prend le relais deux minutes après. Autre ambiance, le président du parti joue, lui, une carte plus constructive. S’il doute qu’un « fidèle » du Président puisse « rompre avec la politique qu’il conduit depuis huit ans », il affirme que le RN jugera « la politique menée » et jaugera le nouveau chef du gouvernement « sur pièce » et « à l’aune de nos lignes rouges ». « Nous sommes à sa disposition pour les lui rappeler, au nom des millions de Français qui attendent et espèrent une alternance », conclut Bardella, qui assume de faire les yeux doux à la droite… dont est issu à l’origine Sébastien Lecornu (ex-LR).

Deux salles deux ambiances

Étrange impression d’un « deux salles deux ambiances ». Car cela faisait bien une semaine que le RN estimait qu’il n’y avait qu’une solution viable à la crise politique actuelle, à savoir une dissolution « ultrarapide » telle que demandée par Marine Le Pen. Ce mardi matin encore, elle estimait que seul serait acceptable « quelqu’un (…) capable de rompre avec le macronisme ». Quand Jordan Bardella enfonçait le clou sur RTL. « Si M. Macron nomme un nouveau Premier ministre, il n’a aucune autre possibilité que de rompre avec la politique menée depuis huit ans, auquel cas les mêmes causes entraîneront les mêmes conséquences : une censure du gouvernement », promettait le jeune président.

Le RN, tout en promettant à voix basse qu’il ne censurerait pas de manière automatique, aspirait à obliger Emmanuel Macron à renoncer à une nouvelle nomination et à emprunter directement la voie d’autoroute menant vers une nouvelle dissolution. Raté. Emmanuel Macron a préféré remplacer François Bayrou, poussant le RN à se faire moins sentencieux.

« Marine Le Pen le respecte… comme elle respectait Bayrou »

Qui plus est, Sébastien Lecornu n’est pas exactement un inconnu pour le RN. Le 15 janvier 2024, en marge de ses vœux à la presse, alors que Gabriel Attal venait d’être nommé Premier ministre, Marine Le Pen louait ses qualités : « Lecornu est habile avec l’opposition, il aurait fait un Premier ministre plus politique… » Hasard ou coïncidence, plusieurs médias ont rapporté que la triple candidate présidentielle et son dauphin avaient dîné dans les mois qui ont suivi avec Lecornu.



Sur le plateau de BFMTV au moment de l’annonce de la nomination, le président délégué du groupe des députés RN, Jean-Philippe Tanguy, a tenté de rester sur la ligne de crête frontiste : dénoncer mais pas non plus insulter. « On a l’impression qu’on découvre quelqu’un de nouveau, mais M. Lecornu a un bilan : secrétaire d’État à l’Écologie, c’était pas terrible, aux Outre-Mer, une catastrophe et au ministère des Armées, il avait une solution de facilité : distribuer de l’argent », a tout d’abord taclé le député, avant de lâcher : « Peut-être qu’il va réussir, je ne souhaite pas la politique du pire. »

« C’est le dernier des macronistes mais tout dépendra du budget. Il faudra de très grosses concessions pour qu’on ne le censure pas. C’est une nomination illégitime (parce que les Français veulent en revenir aux urnes », lâche un cadre du RN, avant de glisser : « Marine Le Pen le respecte… comme elle respectait François Bayrou. »