« Damian Penaud s’en fout, il connaît pas une tactique » : Nans Ducuing raconte les stars du Top 14 qui l’ont marqué
L’ancien arrière de Bordeaux-Bègles, désormais retraité, a entamé une reconversion comme consultant pour Canal +.

On le retrouve, arrivé tout droit de la gare Montparnasse, prêt pour sa grande première au « Canal Rugby Club ». À 33 ans, Nans Ducuing n’est plus un rugbyman professionnel depuis sa retraite après dix ans à Bordeaux-Bègles.
Désormais consultant pour le diffuseur du Top 14 Canal +, l’ancien joueur réputé pour son humour et sa franchise a pris le temps d’évoquer ses souvenirs de joueurs qui l’ont marqué. À sa manière.
Son joueur le plus rapide
« La fusée Louis Bielle-Biarrey, avec qui j’ai joué à Bordeaux. Quand j’essayais de le suivre, j’avais tous les boulons qui tremblaient. C’est un truc inné chez lui, c’était criant dès ses premiers entraînements avec nous, et en plus il l’a bien bossé. Même Damian Penaud qui court très vite, il monte à 35 km/h aux tests physiques, lui, il finit à 38. À chaque fin d’entraînement, on faisait des sprints. Je partais cinq mètres devant lui, on arrivait en même temps sur la ligne des 50 m. Et je m’arrachais comme un âne (rires). »
Son joueur le plus dur physiquement
« Josua Tuisova (trois-quarts du Racing 92), et je pense qu’on est unanimes là-dessus dans le Top 14. C’est un rocher, même les avants doivent se mettre à deux dessus pour l’arrêter. Il est très difficile à prendre. Tu essaies en haut, tu te fais éjecter. Tu tentes en bas, pareil. Il est effrayant. Moi, je me suis toujours arrangé pour l’éviter (rires). Il est aussi ultra-véloce. Tu as l’impression qu’il vient te défier frontalement, tu te mets sur les talons et hop, il te prend au sprint. »

Son joueur le plus inventif
« Matthieu Jalibert, c’est quand même un maestro. Il réussit 90 % de ce qu’il fait. À l’entraînement à Bordeaux, il se balade, il fait ce qu’il veut. Il voit tout avant tout le monde, et te cale des gestes de classe. Tu tentes les mêmes, ça finit en tribunes une fois sur deux. C’est fascinant d’être aussi régulier dans l’exceptionnel. »
Son joueur le plus sous-coté
« Julien Dumora (ex-arrière de Castres), qui a pris sa retraite la saison dernière. Au pied, il avait tout le panel. Il nous baladait et nous faisait faire l’essuie-glace en tapant partout. Il enchaînait les matchs, il était régulier, il est champion avec Castres. Qu’il n’ait pas eu de sélection en équipe de France, c’est une anomalie. »
Son joueur le plus chambreur
« Moi, en jouant à l’arrière, j’étais loin de tout le monde, donc je n’entendais pas tout. C’est un regret, j’aurais rêvé venir klaxonner untel ou untel, mettre une petite pièce. Mais certains branchent pas mal en effet : des mecs comme Thomas Ramos, ou encore Rory Kockott. Ça parle pas mal sur le terrain, de rugby ou pas que. Heureusement qu’il n’y a pas les micros partout. »
Son joueur le plus méchant
« Will Skelton (joueur de La Rochelle), l’homme et demi. On dirait qu’il joue avec ses gosses, il a des mains énormes et doit chausser du 56. Tout est disproportionné. Il est impressionnant physiquement et tu sens qu’il vient sur chaque impact pour intimider et faire mal, à l’ancienne. Il se fait craindre. Toute la semaine avant les matchs entre Bordeaux et La Rochelle, je ne lâchais pas Cyril Cazeaux (deuxième ligne de Bordeaux). Je le faisais monter dans les tours, et les deux s’empoignaient le week-end après. »

Son joueur le plus cool
« Il y en a plein, mais celui qui vit le rugby de manière très décontractée, c’est Damian Penaud. C’est un compétiteur, mais alors il a un détachement… On a des horaires pour sortir à l’échauffement sur les matchs. Nous, on est changés, on est chauds, et lui, il joue aux échecs sur son téléphone, Birkenstock aux pieds. Il s’en fout, il ne connaît pas une tactique (rires). À l’entraînement, il est là sans être là, il t’envoie des passes en touche, il ne fait que rire… Pour la vie de groupe, c’est extra, mais pour les entraîneurs, tu ne sais jamais s’il y est ou pas. Mais quand il rentre sur le terrain, il se transcende. C’est un génie. »
Son stade le plus tendu
« Pour l’avoir vécu dans les deux camps, l’entrée à Aimé-Giral à Perpignan, c’est quelque chose. Le bus visiteurs s’arrête derrière le stade, tu fends la foule, il n’y a aucune sécurité. Les mecs te font une « haie d’honneur », tu te fais insulter, il y a des fumigènes, tu en prends plein la tête. Un jour, je suis descendu derrière Christophe Urios. Qu’est-ce qu’il avait ramassé le pauvre, j’étais fendu derrière. »
Sa plus grosse soirée
« Pendant le confinement, quand on jouait à huis clos avec les règles sanitaires. On se retrouvait entre joueurs dans le stade Chaban-Delmas, on faisait les DJ, les serveurs, on a passé des soirées incroyables à faire des bringues jusqu’à pas d’heure. Une fois, on a commencé à Chaban, puis on a fini chez moi. Très grosse erreur. On a sorti une chicha, ça a fini très tard. Résultat : on a tous eu le Covid, ça a fait une espèce de cluster. »
Son match avec la météo la plus difficile
« À Oyonnax, il y a deux ans. Il y avait de la neige, on balaie les lignes avant le match pour qu’on puisse jouer. C’était du snow rugby, j’avais les doigts gelés, c’était la banquise. Ça ne jouait pas trop, donc j’avais pris des chandelles tout le match. J’en reviens à Damian Penaud, mais ce jour-là, il avait tellement froid que pour se réchauffer, il se mettait les mains dans le caleçon sur les parties intimes quand le jeu était sur l’autre aile. C’était lunaire, je n’avais jamais vu ça. »






